vendredi 1 février 2008

Contes pour minuit-suite (le début de cette nouvelle se situe en bas de page)


Martha Hawkins, l'air désolé, se tourna à nouveau vers le Révérend Mattews :
"Mon pauvre frère n'a hélas plus toute sa raison. Cela est du a un accident de voiture, le même qui tua nos parents. Les médecins l'ont sauvé grâce à une trépanation mais ils ont également ajouté, après l'opération, qu'il ne serait plus jamais comme avant : le cerveau avait été atteint.
- Je suis désolé."
Avoua sincèrement le jeune pasteur.
La jeune femme se ressaisit :
"Mais que cela ne nous empêche pas de prendre le thé."
Le serviteur à l'air pompeux entra, poussant devant lui une table à roulettes garnie d'une théière, de deux tasses, d'un petit pot à lait et d'une coupelle de biscuits.
Martha Hawkins se mit à tourner délicatement sa petite cuillère :
"Prendrez-vous du lait, Révérend ?
-Non, merci miss Hawkins; mais si je puis me permettre : je viens de faire la connaissance de votre jeune frère, il m'a pourtant l'ait fort équilibré, bien qu'un peu timide ?
- Hélas, les apparences sont trompeuses. Mon frère passe ses journées dans sa chambre, il a descendu un vieux miroir du grenier, celui qui ornait la chambre de nos parents. J'ignore à quel usage il l'emploie : il en possédait déja un auparavant. Mon mari et moi n'apercevons David qu'au heures des repas."
Malgré le mobilier luxueux, le faste de la demeure, il régnait une atmosphère étrange, qui mettait mal à l'aise le jeune pasteur.
"Votre frère allait-il au collège auparavant ?
- Certes, c'était un brillant élève et un sportif émérite. Ses sports préférés étaient le criquet et la natation.
- Sa constitution robuste en témoigne.
- Oui, il aimait aussi beaucoup la moto et aurait toujours souhaité en posséder une.
- Vraiment ? Savez-vous que sur ce point je partage ses goûts ? Je me suis rendu jusque chez vous sur mon engin personnel.
- Voilà une bien étrange passion pour un Pasteur."
Remarqua en souriant la jeune femme.
"C'était aussi l'opinion de mes derniers fidèles."
Lorsque le Révérend Mattews repartit, il se retourna une dernière fois et fit face au vieux manoir.
Alors qu'il passait à nouveau le portail de bois, le jeune David sauta la la balustrade et bondit devant lui :
"C'est une belle machine que vous avez là Révérend."
Dit le jeune homme en désignant la moto qui était béquillée sur le bord de la route.
"En effet, c'est une "Velocette Thruxton 500 cm3, une moto assez rare et ancienne.
- Je vais vous avouer quelque chose Révérend; vous m'êtes sympathique. Beaucoup plus sympathique que votre prédécesseur.
- J'en suis heureux. Voulez-vous que nous soyons amis ?"
Cette simple proposition remplit visiblement de joie le coeur du jeune garçon :
"Il y a bien longtemps que je n'ai plus d'amis : ma soeur prétend que je suis un malade mental. Je l'aime beaucoup, mais elle ne peut pas comprendre. A vous, je vous expliquerai."
Et, le visage illuminé, il ressauta la balustrade.


A SUIVRE...

mercredi 30 janvier 2008

LE MIROIR, suite

Le début de cette nouvelle se trouve en bas de page...



La lourde porte de chêne noircie par les années s'ouvrit. Un serviteur à l'air pompeux se montra dans l'entrebaillement :
"Avez-vous rendez-vous Monsieur ?... Oh, pardon mon Révérend ! Miss Hawkins vous attend; entrez je vous en prie."
Le grand salon, meublé style "rococo", était aussi somptueux que vaste. Une immense bibliothèque bourrée d'ouvrages de toutes sortes faisait le tour de la pièce. Miss Hawkins était assise sur le canapé à franges. Le pasteur n'en crut pas ses yeux : il s'attendait, en entrant ici, à trouver une de ces vieilles dames patronesses qui font le bonheur des paroisses et l'encombrement des confessionnaux pour avouer la tête basse leur passion pour les petits gâteaux à l'heure du thé.
Or, il avait devant lui une ravissante jeune femme brune ayant à peine dépassé la trentaine d'années. Elle était vétue d'un sage tailleur à carreaux et se leva pour acqueuillir le jeune pasteur. Sa main droite aux ongles vernis se tendit vers lui :
"Révérend Mattews je présume ?
- En effet, oui; mes hommages miss Hawkins.
- Asseyez-vous, je vous en prie, vous prendrez bien une tasse de thé ?
- Avec grand plaisir.
- Mon mari est absent pour l'instant, il est en ville."
La jeune femme fut interrompue par par une cavalcade dans l'escalier aux marches recouvertes de feutre rouge.
Un jeune garçon apparut. Il devait avoir une quinzaine d'années. Il posa des yeux surpris su le pasteur, interrompant sa course au pied de l'escalier.
Miss Hawkins interpréta la subite apparition :
"Oh, Révérend, je vous présente mon frère David Burton; David, viens saluer le Révérend Mattews qui nous fait l'honneur d'une visite."
David s'approcha comme prudemment, tendant une main hésitante au jeune pasteur :
"Bonjour Révérent, comment allez-vous ?
- Bien, merci David, et vous-même ?"
Le jeune homme avait une attitude bizarre : il pesait visiblement ses mots, tout en donnant l'impression qu'il ne réfléchissait pad à ce qu'il disait. La jeune femme se tourna vers lui et lui dit gentiment :
" Veux-tu du thé David ?
- Non, merci, tu sais bien Martha, que j'ai toujours eu horreur du thé."
Et il s'éclipsa par la porte d'entrée.

A suivre...
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lundi 31 décembre 2007

Contes Pour Minuit: LE MIROIR

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dimanche 25 novembre 2007

Naissance du "MIROIR"

Depuis l'enfance, je gardais un souvenir diffus du film de Jean COCTEAU "Le Testament d'Orphée". Une seule image restait imprégnée dans mes souvenirs : celle de Jean MARAIS traversant le miroir...
En 1981, alors que je rentrais d'une soirée passablement arrosée, je passai devant le miroir de ma chambre. Une idée traversa mon esprit embrumé, trop rapidement pour que je puisse la saisir. Ce n'est que le lendemain, muni de ma vieille machine à écrire et d'une solide "gueule de bois", que j'écrivis, d'un seul jet, l'histoire du miroir, comme si les personnages existaient déjà et s'étaient imposés à moi...

LE MIROIR

Le pasteur Mattews tira le verrou du petit portail de bois à la peinture écaillée, et, entrant dans le parc, s'avança d'un pas nonchalant entre deux haies de buis taillées à la perfection par quelque consciencieux jardinier.
Au passage, il admira les magnifiques pelouses d'un vert cru, ornées en leur centre d'un plan d'eau où un ange de pierre laissait couler un filet fin et régulier en un charmant clapotis. La démarche tranquille du pasteur, crissant sur les gravillons de l'allée le conduisit enfin à l'escalier de granit aux marches régulières, au pied de la somptueuse demeure qui ne démentait en rien l'aspect de vie aisée que devait avoir la famille du domaine : c'était un manoir vieux d'au moins deux ou trois siècles.
Devant tant de luxe, le pasteur hésita un moment :
"Il faut pourtant bien que mes nouveaux fidèles fassent ma connaissance si je veux avoir du monde à l'office demain..."
Se dit-il.
Et, s'accrochant à cette dernière réflexion, il gravit les marches de granit blanc et appuya sur le bouton de la sonnette. Au dessous du petit interrupteur, une étiquette était glissée dans l'écran de mica :
"Mrs. and Mrs HAWKINS."


A Suivre...